vendredi 28 décembre 2012

L'amour avec un sexe circoncis ou un sexe intact, selon Jodorowsky


Durant mes vacances j'ai lu (en entier, cela m'arrive rarement) L'Arbre du dieu pendu d'Alejandro Jodorowsky. La légende ironique et tragique de sa famille, traversée par un souffle magique. Voici un extrait [p. 133]. Teresa, épouse et mère, voyante et dresseuse de puces partie en tournée avec Séraphin, un artiste de cirque chilien, écrit une lettre à Alejandro son mari pour l'informer qu'elle ne reviendra plus jamais.

"J'ai cru t'aimer mais c'était seulement un besoin animal, des désirs du membre d'un homme, d'avoir des enfants, des instincts qui ressemblent à ceux des vaches. [...] Ni toi ni moi n'avons su caresser, être tendres, nous fondre l'un dans l'autre. Toi dans ton monde, le Rebbé [rabbin], Dieu, la fabrique de chaussure; et moi dans le mien, le pain, la maison, l'excrément, la haine de la Création; séparés. [...] Tu m'as mise à ton service, comme l'avait fait ton père avec son épouse et le père de ton père, obéissant à la Grande Canaille [Dieu] qui nie par-dessus tout le magique plaisir de la chair. Il est vrai que dans ma condition animale j'ai cru t'aimer, mais je suis tombée amoureuse de Séraphin comme d'un être humain. C'est une chose grandiose que tu ne peux pas connaître... Ne crois pas que je n'ai pas été sincère, que je t'ai trompé. Comme j'aurais voulu être fidèle jusqu'à la mort pour qu'en ce moment tu ne souffres pas comme je sais que tu souffres.[...]

"Il y a une semaine, nous avons donné une représentation dans la mine de charbon de Lota [Chili]. Les mineurs ont voulu que nous descendions dans les galeries profondes pour que le rire et le savoir habitent pour une fois ce monde obscur. Séraphin a été plus brillant que jamais, utilisant aussi la prestidigitation: il a été un nouveau roi Midas qui transformait en banane tout ce qu'il touchait. J'ai ressenti ce qu'il était en train de dire: "Tout est nourriture, même la douleur." Ensuite, je n'ai lu que d'aimables prédictions, donnant à chacune de ces taupes la promesse de l'air et de la lumière. Ils nous ont beaucoup aimés et pour preuve d'amitié nous ont mis leurs casques métalliques et nous ont barbouillés la figure de suie. De retour dans la roulotte, Séraphin m'a regardée, a eu des convulsions et est tombé à mes pieds en murmurant: "La Vierge de la Nuit..." Je lui ai caressé sa nuque velue. Il a grimpé vers moi comme un enfant et s'est installé entre mes seins.[...]

"Quand il a senti la chaleur de mon regard, il a ôté son costume de clown et m'a montré son corps tout entier, une sculpture vivante. Toute à l'extase que me produisait cette nudité, j'ai étendu les mains et j'ai laissé son sexe reposer entre mes paumes humides. J'étais habituée à ton membre volumineux, dur, insensible, avec son arrogante tête nue. Le pénis de Séraphin était pâle, fin, doux et surtout, complet. Son tendre prépuce lui donnait un secret sensuel, une modestie puissamment attirante, en fait une tranquille normalité animale, sans le coup de couteau de la religion, sans aucun compromis avec Dieu. Quand tu me pénétrais, Jéhova rentrait avec toi. Il avait ordonné qu'on te coupe un morceau pour s'approprier tes plaisirs. J'ai embrassé cette peau avec ravissement, avec ferveur et je lui ai offert toutes les ouvertures de mon corps."
Santa Sangre, film, 1989.


El Topo, film, 1970.

*Auteur chilien, scénariste de BD notamment pour Moebius, psycho-magicien jungien dont l'oeuvre est associée à celles de Topor, Arrabal, Marcel Marceau, Alejandro Jodorowsky a aussi tourné des films felliniesques, surréalistes et joyeusement sacrilèges. Je le considère comme l'un de mes Maîtres puisque j'ai eu le privilège de suivre quelques-uns de ses stages dirigés par ses assistants et lui-même. Massage sous la peau tellement nous étions nus et grattés jusqu'au coeur avec une spatule d'os; tarot divinatoire; étude et reconstitution vivante de notre arbre généalogique. N'est-elle pas belle, la vie des explorateurs de l'intérieur?

mardi 25 décembre 2012

Le pape, la théorie du genre et l'environnement -- discours de Noël


Alors que la chrétienté célèbre la naissance d'un enfant conçu par insémination artificielle, adopté par le fiancé de sa mère porteuse afin que celle-ci ne soit pas déshonorée, Benoît XVI a consacré l'essentiel de son discours de Noël à la critique du "genre" et des personnes LGBT qui songent à fonder une famille. Voici le résumé de la péroraison pontificale tel que diffusé par Zenit, ("Le monde vu de Rome"). Je le publie pour celles et ceux qui cherchent à démêler le bon grain de l'ivraie (expression biblique, l'ivraie étant une herbe toxique -- to separate the wheat from the chaff pour mes lecteurs anglophones). En effet, le pape mêle des considérations de grande sagesse sur la société actuelle à ses propres élucubrations. À vous de trancher. -- André.

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"La question de la famille n'est pas seulement celle d’une forme sociale déterminée", mais c'est "la question de ce qu'est l'être humain et de ce qu'il faut faire pour être de façon juste une personne humaine", estime le pape qui relève des "défis complexes" sur ces problèmes, à commencer par "la capacité de l’homme de se lier", capacité constitutive du couple et de la famille qui en découle.

Accompagnant la diffusion "d'une compréhension erronée de la liberté et de l'autoréalisation", et "la fuite devant la souffrance", il diagnostique un refus croissant du "lien humain". "L'homme demeure fermé sur lui-même" alors que "c'est seulement dans le don de soi que l’être humain se réalise lui-même, et c'est seulement en s'ouvrant à l'autre, aux autres, aux enfants, à la famille, c'est seulement en se laissant modeler dans la souffrance, qu'il découvre la dimension du fait d'être une personne humaine". "Avec le refus de ce lien, disparaissent aussi les figures fondamentales de l'existence humaine : le père, la mère, l'enfant. Des dimensions essentielles de l'expérience du fait d'être une personne humaine tombent".

Dès lors Benoît XVI dénonce une "atteinte à l'authentique forme de la famille" aujourd'hui. Pour lui, c'est la vision "de l'être même, de ce que signifie en réalité le fait d'être une personne humaine", qui est "en jeu". Il voit dans cette évolution les conséquences de la théorie du gender, où "le sexe n’est plus un donné d'origine de la nature, un donné que l'être humain doit accepter et remplir personnellement de sens, mais un rôle social dont on décide de manière autonome". Dans cette mouvance d'une "profonde fausseté", "l'être humain nie sa nature et décide qu'elle ne lui est pas donnée comme un fait préparé à l’avance, mais que c'est lui-même qui se la crée". Il "conteste sa propre nature. Il est désormais seulement esprit et volonté". Le pape observe un paradoxe à ce sujet: l'homme déplore "la manipulation de la nature, pour ce qui concerne l'environnement", cependant il prône un "choix à l’égard de lui-même", il revendique de pouvoir "choisir sa nature".

Or selon Benoît XVI, au contraire, la dualité homme/femme "est essentielle pour le fait d'être une personne humaine", c'est même une "exigence qui provient de la création", car la femme et l'homme sont "des formes complémentaires de la personne humaine". Et "si la dualité d'homme et de femme n'existe pas comme donnée de la création, alors la famille n'existe pas non plus comme réalité établie à l'avance par la création" et c'est finalement l'enfant qui en est victime car "il a perdu la place qui lui revenait jusqu'à maintenant et la dignité particulière qui lui est propre". En effet, "de sujet juridique indépendant en soi, il devient maintenant nécessairement un objet, auquel on a droit et que, comme objet d’un droit, on peut se procurer".

Aussi le pape met-il en garde : "Là où la liberté du faire devient la liberté de se faire soi-même, on en arrive nécessairement à nier le Créateur lui-même, et enfin par là, l'homme même est dégradé dans l’essence de son être". "Dans la lutte pour la famille, l'être humain lui-même est en jeu", conclut-il.

lundi 24 décembre 2012

Gays musulmans, chrétiens et juifs, n'écoutez plus le délire des homophobes !


Jésus va-t-il sortir du placard?

Péril Maya: envolé!


Comme chaque fin d'année Glynn Cardy, vicaire de la paroisse anglicane progressiste St-Matthew à Auckland (Nouvelle Zélande), a choisi un thème qui dérange pour le panneau d'affichage public de son église (ci-dessus). "C'est Noël. Le bon moment pour Jésus de sortir du placard." Son assistant Clay Nelson explique: "Certains chercheurs ont estimé que le Christ a peut-être été gay. C'est une supposition. Peut-être l'a-t-il été, peut-être pas. Qu'est-ce que cela change?" Cardy espère que le panneau attirera l'attention des passants sur le débat du mariage pour tous. "Il n'y a pas trace dans l'Évangile d'un enseignement que Jésus aurait pu donner concernant la sexualité, alors qu'il parle souvent des risques que pose la richesse. Il est certain qu'il a toujours soutenu les marginaux de la société."

Sur le site internet de l'église, parmi les nombreuses réactions négatives concernant ce débat -- et quelques-unes plus favorables -- je relève le commentaire d'Alan. "La bible n'est pas commode. Elle dit juste les choses comme elles sont, par ex. Jésus est 100% Dieu et 100% homme, ce qui n'a pas de sens. Aussi, nous nous trouvons dans la position d'inventer notre propre culte chrétien si nous choisissons ce qui nous convient dans les textes. En ce qui concerne l'homosexualité, la bible est cohérente: c'est un péché. Tout à fait noir et blanc, pas de nuances. Alors, si vous dites que ces passages sont dans l'erreur, comment serez-vous assuré que Dieu est Amour? On ne peut pas choisir selon notre préférence. L'évangile de Matthieu 7:21-23 "Ce n'est pas en me disant 'Seigneur, Seigneur' qu'on entrera dans le Royaume des Cieux, mais c'est en faisant la volonté de mon Père..." le résume et cela me terrifie. Si cela ne vous fait pas peur, il se pourrait que vous ne soyez pas chrétien!"

Jingle bells.

Mieux vaut payer cash que d'aller en enfer...

Les gays élevés dans la foi musulmane, chrétienne ou juive connaissent ce dilemme. Que faire, baisser la tête ou rompre avec la tradition religieuse? À Auckland, ils ont deux pasteurs qui peuvent les comprendre. Mais ailleurs?

"Vous demandez toujours plus!"
"Prenez la vie du bon côté!"
Ceux d'entre nous qui avons le privilège de vivre dans un monde occidentalisé ne risquons pas notre vie. Mais alors que la situation évolue, les changements suscitent beaucoup de malveillance. Et les discours hostiles de certains porte-parole politiques, religieux, ainsi que d'experts en santé publique qui donnent libre cours à leur homophobie personnelle (en invoquant des "lois naturelles", "décrets divins" et "traditions immuables") enfoncent le couteau dans la plaie de nombreux gays. Comme les autres marginaux de la société -- les gens fragiles dans leur santé physique ou mentale, les citoyens d'une autre race ou d'une autre religion, les étrangers en quête de travail --, nous prenons de nouveaux coups là où cela fait mal depuis longtemps.

"Vous avez le pacs, qu'est-ce que vous réclamez encore?" me demandait un membre de ma famille, alors que je n'avais pas abordé ce sujet. "Je te rappelle qu'il faut un homme et une femme pour faire des enfants!" Père de famille, divorcé. "Merci docteur, ai-je répondu, je ne savais pas!" J'ai choisi la séquence finale du film La Vie de Brian des Monthy Python (1979) pour illustrer notre situation. Et en rire, si c'est possible.

Il va les libérer.

André

samedi 22 décembre 2012

Où et comment accrocher les boules s'il vous manque le sapin






Faisant confiance à l'apocalypse -- ou par indolence --, vous n'avez acquis ni sapin ni cadeaux réglementaires... Voici quelques suggestions de dernière minute. Pendez des boules multicolores au bon endroit si les vôtres (de boules) ont perdu de l'intérêt auprès de celui qui vous tient à coeur. Ce sera votre message "Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté". Et pourquoi ne pas offrir quelques anneaux à insérer dans les bijoux de famille (un bon pour un piercing) en attendant qu'on vous passe la bague au doigt? Les gays à haut revenu, eux, n'ont jamais imaginé que le monde -- tel qu'il le connaissent -- disparaîtrait. On peut le constater ci-dessous... Mais peut-être se trompent-ils lourdement. L'avenir le dira.