dimanche 28 novembre 2010

Les beaux mecs, le sirocco et l'illumination

Vacances à la Grande Canarie. Une moyenne de 25 degrés; et tous les temps sauf le mauvais. Des jours calmes pour nager dans l'océan; d'autres où les rouleaux défient les nageurs les meilleurs. Et lorsque le sirocco se déchaîne, il ponce les corps nus et recouvre les serviettes de bain qui s'effacent dans l'immensité sablonneuse. Qui va à la chasse derrière les dunes ne retrouve plus sa place.

Le "Coeur est un chasseur solitaire", écrit Carson McCullers en 1940. Tout mec abrite un chasseur au fond de ses tripes. Récit de mes rencontres les plus cools... Tim et moi sommes devenus potes à la vie à la mort parce que j'étais son supporter le plus démonstratif, le soir au bar de l'hôtel, lorsqu'il se lançait dans une chorégraphie à la suite de l'animateur maison. Tim tenait la scène avec l'enthousiasme de la jeunesse, sans crainte du ridicule qui paralyse tant de vieilles personnes. Originaire de Dresde, Tim est un beau mec à l'air déterminé, typiquement saxon. Il a décidé que nous nous reverrons l'an prochain -- même hôtel, même époque. Sans consulter ses parents. Tim a fêté son cinquième anniversaire hier; il a invité quatre copains. Pas de filles. À son âge comme au mien, on pense que les femmes sabotent les fêtes. À moins d'en être amoureux.


Adim, masseur mystique.
Un bon camarade m'a présenté le mystérieux Adim. Ancien adepte de Hare Krishna (no sex), Adim est devenu disciple d'Osho [qui se nommait Rajneesh lorsqu'il était vivant et qu'il collectionnait les Rolls Royce]. J'apprécie la méditation dynamique qu'Osho a popularisée; elle marie le recueillement à la contemplation et au mouvement répétitif qui induisent une transe hypnotique. Durant une méditation dynamique, je ressens cette harmonie sensuelle entre le corporel et le spirituel qui se manifeste aussi dans l'acte d'amour abouti. Le splendide Adim prêche la bonne parole du yoga tantrique, de l'alimentation végétarienne et du massage reiki tout en te chauffant de désir. Comme dit mon camarade, il est à la fois manipulateur et intouchable, flirt et touchant. Alors que nous étions nus sur la plage, épaule contre épaule et que je caressais son dos enduit de filtre solaire, j'ai interrogé Adim: dans quel corps espérait-il renaître, lors de sa prochaine vie? Tout en souriant, comme si c'était une plaisanterie, il m'a rappelé qu'on ne renaît plus lorsqu'on a atteint l'illumination. Ignorant et curieux, je lui ai donc demandé si l'on a encore besoin de se protéger des rayons du soleil lorsqu'on est si proche de la pleine illumination spirituelle.

André

jeudi 25 novembre 2010

Scandale au cours d'anatomie des Beaux-Arts

Thomas Eakins, The Swimming Hole, 1884-1885.
Six hommes se retrouvent pour plonger et nager en toute intimité au bord d'un petit lac ou d'une rivière paisible. C'est l'huile sur toile intitulée The Swimming Hole que Thomas Eakins [cf. billet de vendredi dernier] a peinte entre 1884 et 1885, non pas d'après nature, mais en s'inspirant des photos qu'il a prises lui-même et où posaient des amis et des élèves. Le corps en mouvement est l'un de ses principaux sujets d'étude.

Étude pour The Swimming Hole.
En janvier 1886, lors d'une leçon d'anatomie devant sa classe mixte à l'Académie des Beaux-Arts, alors qu'il parle de l'abdomen, Eakins retire la serviette qui couvre le sexe de son modèle masculin.  Les parents des étudiants protestent énergiquement. Eakins est obligé de démissionner.

Thomas Eakins, Reclining Male Nude, vers 1887.
Trente-huit jeunes hommes parmi ses élèves quittent l'Académie pour le suivre. Ensemble ils fondent la Ligue des étudiants d'art où il peut librement enseigner avec l'aide de modèles nus. C'est dans une ambiance très libre qu'ils s'adonnent à la photographie de la nudité frontale dans un but académique. Je ne sais pas ce qu'en pense Susan Macdowell Eakins, épouse de l'artiste et peintre elle-même.

À Philadelphie, déjà avant le XXe siècle, on enseignait la photographie sous son angle artistique, et non seulement pour collecter des documents!


André

lundi 22 novembre 2010

Un homme prend congé du couillon dépressif qu'il était

Débarquant à San Francisco en 1987, Alexander a décidé de rédiger un journal. "Je me lançais dans un nouveau chapitre de ma vie et je voulais noter mes impressions. [...] J'ai continué jusqu'en 2003, où le diagnostic de cancer a changé le cours de ma vie. D'abord j'ai imaginé que je consignerais chaque étape de la maladie, puis j'ai changé d'avis: c'était trop déprimant." Alexander n'a jamais cru que le cancer le tuerait, mais si cela devait se produire, il ne voulait pas que les dernières pages de son journal soient consacrées aux horreurs de la radiothérapie... Depuis, il n'a plus jamais touché à son journal.


Si ce n'est pour le reformater de WordPerfect à Word for Mac. Je vous passe le détail des difficultés techniques, le découragement... Dans son blogue Voenix Rising, Alexander le survivant mentionne (le 8 novembre 2010) qu'il a jeté son journal à la corbeille. "En relisant les notes, je me suis rendu compte que je ne supportais plus l'auteur. J'avais envie de traverser l'écran, de serrer ce mec de trente berges à la gorge, de le secouer vigoureusement et de lui dire: sors de l'adolescence espèce de trouduc et fonce! [...] À l'époque, je traversais les meilleures années de la vie dans une ville passionnante, mais j'étais profondément misérable sans m'en rendre compte."

Alexander est retourné à Phoenix, Arizona, où il vit maintenant avec "l'amour de sa vie". Le gars qui a émergé à l'autre bout du tunnel -- après le cancer et après San Francisco -- est un homme différent: "En quittant San Francisco, j'étais  exactement le genre de personne que je m'étais juré de ne jamais devenir seize ans plus tôt"... Changer de vie plusieurs fois dans une même existence; bouleverser, renverser, innover, tomber amoureux, retomber, révolutionner, transfigurer: c'est excitant!

André -- Dessin via: Bosgars.

vendredi 19 novembre 2010

Un jeune boxeur nu et musclé face à des bourgeois

Étude. Photo prise dans l'atelier du peintre.
Thomas Eakins: Salutat. La solitude du boxeur.
Tel le gladiateur entrant dans l'arène, le boxeur se présente au public. Rite millénaire. Celui qui va frapper et souffrir ou mourir vous salue! Un petit gars de la classe ouvrière face à des bourgeois qui ont payé pour le voir perdre ou gagner; leur rapport à la violence du pugilat est purement de spectateur. Ils vont connaître une montée d'adrénaline et de testostérone dont leur légitime accueillera les effets plus tard. Ce tableau de l'Américain Thomas Eakins intitulé Salutat date de 1898. Il met en valeur le corps du jeune homme, musclé et vulnérable dans sa nudité, objet de l'admiration du public -- adoration virile, sensuelle, envieuse, sadique -- et masochiste aussi de la part de ceux qui aimeraient connaître le secret de l'endurance: savoir encaisser des coups foudroyants et retourner obstinément au massacre.

Taking the Count. Le comptage. 1898.
Peintre, photographe et sculpteur, Thomas Eakins (1844-1916) était aussi professeur aux Beaux-arts. Ses thèmes: les habitants de Philadelphie, les portraits de connaissances ou de personnalités des arts et sciences. Il a beaucoup photographié ses amis et ses élèves, en particulier pour travailler à la composition de ses tableaux. Il avait quelques jeunes compagnons dans le milieu de la boxe dont il était très proche, je crois. Sa manière de traiter le sujet révèle non seulement sa préférence sexuelle, mais aussi l'homoérotisme souterrain qu'il ressentait dans la société exclusivement masculine réunie autour de sports tels que la lutte, la boxe et la natation. Le thème était tabou à l'époque, il n'était ni nommé ni étudié. Mais des artistes comme Eakins, ou son aîné le poète Walt Whitman, levaient le voile sur ce désir caché pour tenter d'éclairer leurs contemporains.


Ce qu'on peut remarquer aussi chez les boxeurs qu'a peint Eakins: comme lui, ils sont des personnages connus et pourtant fondamentalement solitaires.


André

mardi 16 novembre 2010

Un voyage qui conduit le héros au-delà du coming out

Odyssée dans la ville.
À la suite du suicide de plusieurs adolescents américains harcelés par leurs camarades, le thème de la sortie du placard, du coming out, est revenu plusieurs fois depuis le 2 octobre sur ce blogue. Dans les commentaires, Victor a contribué deux fois au débat (30 oct. et 2 nov., cliquez). Le cas de l'évêque Gene Robinson, un chrétien lumineux dont la vie est en danger, a illustré les risques que certains prennent pour cultiver la vérité. Expliquant sa situation, Victor écrit: "Bien sûr ce n'est jamais le moment quand on sait que la réaction ne sera pas positive... Mais dans l'état actuel des choses, mon coming out n'est pas ma priorité, même si une partie de mon bien-être en dépend." Je respecte Victor pour sa sagesse, sa piété filiale et son partage avec nous. Je mets simplement jamais et quand on sait que en question. On ne sait pas; et jamais ne peut se dire qu'au passé.


Dans les grandes épopées, comme L'Odyssée d'Homère ou Le Seigneur des anneaux de Tolkien; dans les superproductions comme Titanic et Avatar de Cameron, on remarque que les sentiments humains sont universels, les destins aussi, bien qu'ils puissent s'exprimer de différentes manières. Au cours de son aventure (sa vie) le héros affronte des épreuves successives pour obtenir l'objet (connu ou pas encore) de sa quête. Au début, on se demande s'il acceptera le défi qui se présente ou restera dans ses pantoufles, par peur de l'inconnu. Un mentor advient pour l'encourager, lui offrir une épée magique ou lui foutre un puissant coup de pied au cul. Et hop! le héros passe le seuil du non-retour, prêt (mais tremblant) à rencontrer des ennemis et des alliés, à subir des épreuves. Et ainsi de suite jusqu'à ce qu'il affronte l'épreuve suprême et découvre le trésor. Puis il revient dans son milieu d'origine, transformé par ses expériences -- si du moins il y a survécu.
James Bond aussi déprime.


Pour les héros que nous sommes d'emblée, parce que nous avons une différence à assumer qui nous rend plus éveillés -- gay, beur, black, jumeau, trop petit, gros, sourd-muet -- la sortie du placard se présente comme l'une des épreuves à traverser victorieusement. Il y en a d'autres, très importantes aussi, pour nous amener à l'âge d'homme, celui qui donne un sens à l'aventure et nous permet d'en faire profiter notre entourage. Et le voyage continue...


André
Photos: Booty de Richard J. Rothstein via Manhattan Men. Daniel Craig, ci-contre,
dans la série de portraits Crying Men de Sam Taylor-Wood. 

samedi 13 novembre 2010

Modèles académiques de père en fils

L'exposition de "Nus académiques" (1664-1790) qui se tient au Musée des beaux-arts de Bordeaux jusqu'à fin janvier attire notre attention sur les artistes, mais aussi sur leurs modèles et les moeurs de l'époque. Elle présente cent dessins appartenant à la collection de l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris.
En France, l'Académie est un rassemblement de vieux couillons chargés d'empêcher la langue d'évoluer. Ailleurs c'est une société savante, ou pas (Académie de coiffure, de karaté, de billard). Ce qui nous intéresse ici, c'est l'académie exercice de dessin et de peinture, où l'on travaille d'après un modèle nu. Aux 17e et 18e siècles, apprendre à dessiner d'après un être vivant et non seulement des reproductions de statues était une exigence. L'institution n'autorisait que les modèles masculins.

L'École disposait de modèles de conformations physiques et d'âges différents. Ils devaient être endurants pour tenir la pose longtemps, parfois dans des positions très inconfortables et, bien sûr, face à des artistes qui s'en foutaient royalement. Une dose d'exhibitionnisme pouvait soutenir leur moral, mais pas le petit narcissisme de la folle ordinaire. Ceux qui ne supportaient pas la discipline étaient priés d'aller... se rhabiller. On note des cas de charge "héréditaire" comme chez les Gobin où François a succédé à son père après avoir posé avec lui pour Les lutteurs de Nocret, Gobin le jeune étant de face. D'autres doubles académies étaient réalisées à l'économie et l'on reconnaissait le même visage sur les deux personnages.

En haut à g.: Homme debout frappant un taureau, Antoine-Jean Gros (1790). À dr.: Les lutteurs, Jean Nocret (1666). En bas à g.: Homme assis, Jean-Baptiste Isabey (1789). À dr.: Hercule au repos, François-Guillaume Ménageot.
 
André

mercredi 10 novembre 2010

Obtenir le vote des pauvres avec les fonds des riches

Combat d'Hercule et Diomède.
Qu'il s'agisse de l'irruption d'une majorité républicaine à la Chambre des représentants américaine, des réformes que le président Obama avait promises et qui sont pratiquement noyées sous les vociférations et les contradictions de ses adversaires politiques, des intrigues et mensonges dont ces derniers usent pour tromper un peuple qui ne demande qu'à l'être. Qu'il s'agisse finalement de la prochaine votation populaire le 28 de ce mois en Suisse: j'ai de la peine à souffler aujourd'hui et une douleur dans le dos qui a résisté à la séance de yoga hier.


Le peuple suisse va-t-il se laisser convaincre par le parti le plus populiste de voter en faveur du durcissement de la loi sur le renvoi des étrangers délinquants? Alors que cette décision ne sera pas applicable et vaudra au pays nain d'inextricables ennuis avec ses voisins de l'Union européenne. Comme déjà l'idiote votation sur l'interdiction d'ériger des minarets à côté des mosquées qui, elles, n'étaient pas concernées... Les Suisses deviendraient-ils aussi tocards, limités et fanatiques de l'auto-goal que les Amerloques?
Hercule victorieux et ivre.


Seule consolation, si c'en est une: rien de nouveau sous le soleil. Croyez-en Oscar Ameringer, né en Allemagne en 1870, émigré à Oklahoma City en 1907 et qui a participé à la fondation du plus grand mouvement socialiste des États-Unis. Il a écrit: "La politique est le noble art d'obtenir le vote des pauvres et les fonds des riches pour mener une campagne, en promettant à chaque camp qu'on le protégera de l'autre." Résultat, selon la formule américaine: ils se tiennent tous par les couilles. Les pauvres ont besoin des clowns populistes pour les divertir [dans tous les sens], les riches pour collaborer à leurs basses oeuvres, et les clowns psychotiques n'existeraient pas sans leur public.

André

lundi 8 novembre 2010

Menacé de mort, l'évêque gay porte un gilet pare-balle

Sortir du placard n'est pas une garantie de vie facile. Gene Robinson, premier évêque ouvertement gay de l'Église épiscopalienne américaine (rattachée à la Communion anglicane) a annoncé samedi qu'il mettra bientôt fin à son ministère pastoral à cause des menaces proférées contre sa vie et de la controverse autour de sa nomination qui ne s'est pas apaisée depuis 2003. "Ces sept dernières années nous ont fortement éprouvés, moi, ma famille et vous les membres du diocèse", écrit-il dans un message adressé aux fidèles. Lors de sa consécration dans le diocèse du New Hampshire, l'évêque avait été obligé de porter un gilet pare-balles. "Les menaces de mort, et maintenant l'extension au monde entier de la polémique déclenchée après votre décision de m'élire ont pesé, non seulement sur moi, mais aussi sur mon bien-aimé époux, Mark, qui m'a fidèlement soutenu."
Mark et Gene, "pacsés" en 2008.

Robinson, fils de paysans, prêtre (protestant), avait discuté de son désir des hommes avec sa future épouse. Ils se sont mariés en connaissance de cause, ont eu deux filles qui le soutiennent activement, comme le fait son ex-femme. Ils ont divorcé bien avant que Robinson ne rencontre Mark Andrew. Les deux hommes sont pacsés depuis que le New Hampshire a instauré l'union civile; deux policiers assuraient leur protection durant la signature du contrat. C'était en 2008 et Robinson devait se rendre en Grande-Bretagne où allait se tenir la conférence mondiale des Églises de la Communion anglicane qui a lieu tous les dix ans. L'évêque avait expliqué que cette mesure assurerait la protection légale de son compagnon et de ses deux filles en cas de nécessité.

Les Églises de la Communion anglicane en Afrique, Asie, Angleterre et aux États-Unis sont divisées concernant l'autorité de la bible sur la vie privée -- avortement, divorce, remariage, homosexualité, et sur le ministère des femmes... Si le débat est vif, seule une frange (pas uniquement épiscopalienne) de terroristes menace l'évêque. Chrétien, il ne faut pas l'oublier, n'est pas une appellation contrôlée. Certains christianistes ont oublié comment Jésus/Dieu distinguera ses élus lors du bilan final. "J'ai eu faim et soif, vous m'avez donné à manger et à boire; j'étais un étranger, vous m'avez accueilli; nu et vous m'avez vêtu; malade, vous m'avez visité; prisonnier et vous êtes venus me voir." Cette attitude fonde encore la morale occidentale, même sécularisée. Jésus l'explicite ainsi: "Dans la mesure où vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait". (Matthieu, chap. 25.)

André

samedi 6 novembre 2010

Nager dans l'eau fraîche pour soigner une petite crève

Sans grelotter.
Hier je suis allé nager avec un pote. La température de l'eau était de 11 degrés, celle de l'air 16. Nous avons passé deux heures à poil au soleil sur les rochers abrités. D'ordinaire, début novembre, le Léman ne s'est pas encore trop refroidi. Mais la bise a soufflé. La terre est assoiffée: en tombant des arbres, les feuilles émettent un bruit cassant.


Je nage volontiers dans l'eau froide, à condition d'être réchauffé par le soleil sur mon corps nu, rouge et brûlant lorsque je sors de l'eau. Je ne me sèche pas. La peau contient des glandes sudoripares (même fonction que les reins), des terminaisons nerveuses et des capillaires qui continuent à réagir et répercutent la stimulation à tout l'organisme. Attention: je le faisais d'instinct, mais j'ai lu récemment pourquoi c'est si puissant (circulation, tonus, force nerveuse, digestion). Alors qu'il me faut un long moment pour m'acclimater à une eau de 14 à 18 degrés, plus froide elle ne produit pas de choc; elle anesthésie. Après cinq minutes de natation, le corps réagit et chauffe toutes les extrémités, rendant l'exercice agréable, même s'il demande un peu plus d'énergie. Et la biroute, en déroute? À ceux qui demandent "elle a combien?" lorsque je sors de l'eau, je réponds "ben! regarde"...


Hier, j'avais une petite crève, gorge douloureuse, nez coulant. Vingt-quatre heures plus tard, tout est en ordre. Je pratique la natation d'automne et de printemps depuis ma retraite: il faut être libre à l'heure où brille le soleil. Et le corps des vieux couillons, c'est notoire, est mieux climatisé que celui des blanc-becs, si fragiles...

Nous vivons une époque bénie, moins livrée à la fatalité: de nombreuses maladies et souffrances morales peuvent être évitées ou guéries à condition d'appliquer quelques recettes anciennes et d'utiliser au mieux les avantages de la médecine, avec modération. Pourtant lorsqu'on leur demande comment ils se portent, les bipèdes déclarent: "Mon médecin m'a donné des pastilles pour..." et ce sont des comprimés fort coûteux, ou: "Mon médecin est inquiet". Moi, je nage.


André

jeudi 4 novembre 2010

Les peuples nus qui titillaient les explorateurs

Très tôt après l'invention de la photographie, dès que le matériel est devenu transportable et suffisamment résistant, les explorateurs, colonisateurs, ethnographes, pornographes, missionnaires et aventuriers ont rapporté des prises de vues de leurs voyages dans les pays tropicaux. Peuples débusqués, conquis, exploités, "civilisés", christianisés: l'histoire s'écrit différemment suivant qu'elle est racontée par les étrangers ou par les indigènes.

Les récits de leurs coutumes étranges rencontraient encore plus de succès dans les revues illustrées s'ils étaient accompagnés de photos candides qui révélaient que ces gens ne connaissaient pas la "modestie" chrétienne. On dirait aujourd'hui qu'ils ne ressentaient pas le besoin de cacher ce que nous cachons tout en le mettant en évidence. Je me souviens d'avoir vu, au début des années 1960 dans la brousse au nord du Cameroun, une femme nue sur le chemin; elle portait un soutien-gorge sur la tête et je pense que cela signifiait: regardez combien je suis moderne!


Ces reportages photographiques remplissaient un rôle éducatif pour les jeunes gars "civilisés" en mal d'images érotiques. Ils les lisaient d'une main, comme ils feuilletaient aussi de la même main les pages de sous-vêts des catalogues de mode. On ne trouvait pas de magazines pornos dans les kiosques à journaux. Il fallait connaître une filière; et elles étaient moins nombreuses que les dealers aujourd'hui.

Photos prises en Afrique de l'Est, colonisée par les Allemands, qui ont mené des campagnes militaires sanglantes et achetaient des alliances en livrant des canons. En haut: homme de la tribu Chaga en actuelle Tanzanie (1890). Les deux autres: souvenirs du voyage de Son Excellence Bernhard Dernburg (1907).

André

mardi 2 novembre 2010

Faut-il enfermer ses parents avec soi, au fond du placard?

J'avais l'intention de passer en revue les raisons -- convaincantes ou non -- que présentent les gars qui s'incrustent au fond du placard. Ceux qui ne veulent pas accepter leur propre homosexualité. Ceux qui imaginent qu'ils auront une vie plus belle en mentant à leur entourage. Mais Victor a posté un message important [cliquez] et lucide après lecture de ma note de samedi: "Sortir du placard".

Victor! [D'abord, je ne sais pas pourquoi je vois le prénom de "David" quand je pense à vous; peut-être pourrez-vous me l'expliquer.] Ma seule qualification pour discuter de ce sujet avec vous, c'est que je suis en train de démêler -- avec l'accompagnement de mon thérapeute psycho-corporel -- un écheveau [un embrouillamini] pas si éloigné du vôtre, qui concerne le secret que portait mon père au sujet de ses deux enfants qui m'ont précédé et ont été assassinés. En lisant ce qui suit, peut-être penserez-vous que je débloque...

Vous êtes un fils attentionné qui aimerait épargner à sa mère -- et peut-être à d'autres -- une révélation qu'elle pourrait mal prendre et qui entraînerait une déception pour elle. Pourtant vous le savez: votre homosexualité n'est ni une tare, ni un choix de votre part. (C'est comme de naître avec des cheveux roux dans une famille qui prétend ne pas aimer les rouquins.) Il faudra que votre mère s'y fasse et qu'elle rejoigne le XXIe siècle, plutôt que de se laisser influencer par ses croyances irrationnelles. Vous n'êtes pas la cause de ses erreurs de jugement. Vous pouvez l'aider à changer, c'est tout. Et si vous n'y parvenez pas dans un délai raisonnable, éloignez-vous d'elle jusqu'à ce qu'elle ait suffisamment reconsidéré ses positions. Vous n'êtes pas non plus sur cette terre pour lui épargner des déceptions dont vous n'êtes pas responsable. Dans l'ordre naturel des choses, ce serait à elle de vous soutenir quand vous vous lancerez sur le chemin tortueux de la paternité. Quête d'un compagnon qui partage votre projet. Quête de l'enfant puisque c'est votre désir. Et choix entre l'adoption, l'insémination avec une mère en co-parentalité ou toute autre méthode qui se présentera. Votre maman connaît les difficultés du parcours et la joie de la victoire, Victor!

Si le Destin lui a offert deux enfants homos, c'est peut-être que, dans Sa grande sagesse, Il voulait lui donner l'occasion de revivre l'expérience une fois ou deux (peut-être aussi avec sa fille), pour la libérer de ce qui lui pèse encore. Aidez-la Victor, en lui faisant cadeau de cette possibilité! Votre prénom, ou votre pseudonyme signifie, vous le savez, que vous vaincrez les difficultés, patiemment, mais sans vous sacrifier.

André