dimanche 16 mai 2010

Des nuits et des jours: l'amour gay n'a pas dit son dernier mot

-- 17 mai: Journée mondiale de la lutte contre l'homophobie (3)
Plus de soixante écrivains se sont rendus à Soleure pour lire en public quelques pages de leur nouveau livre ou d'un travail en cours. En allemand, en schwitzerdütsch, en français, italien, néerlandais, russe ou anglais, mais pas rhéto-romanche cette année, si je ne fais erreur. Des voix féminines fortes, des voix viriles -- et d'autres qui exprimaient l'amour au féminin ou masculin pluriels. L'immense Hugo Loetscher, présent encore au printemps dernier en était une. Il nous a définitivement quittés durant l'été 2009.

Simon Froehling, 32 ans, helvético-australien de nationalité(s), est bachelier 2009 de l'Institut littéraire suisse de Bienne. Déjà connu en tant qu'auteur de théâtre, il a lu des extraits de son premier roman Lange Nächte Tag (Bilger, 2010). Patrick, le narrateur, et Jirka font connaissance pendant leur cours de yoga à Zurich et concrétisent quelques heures plus tard. "Der Sex war schnell und leise. Honnêtement, je dirais que chacun l'avait fait de son côté. Comme si nous voulions dépasser l'épisode aussi rapidement que possible afin de garder assez de temps ensuite pour nous découvrir." Les deux gars traversent des épreuves lourdes, d'autres légères, passent et gâchent leurs nuits dans les boîtes comme il est d'usage à leur âge. Ils alimentent leur jalousie ou leur dépit en se surveillant mutuellement sur la toile. Forment-ils un couple? "Est-ce que tu es souvent sur le net? [...] La question signifiait: j'ai vu que tu te branches tous les jours sur le Salon bleu. J'ai vu que tu n'as pas changé ton statut, tu marques toujours Single et j'aimerais savoir si tu..." Il se passe des choses dramatiques sous la douche, et d'autres plus gaies: "...und wir lieferten uns einen Schwertkampf, et nous nous étions battus à la pointe de l'épée, duel qu'aucun ne pourrait gagner, jusqu'à ce que nos queues soient vaincues par les coups et nos visages tordus de rire."

Le rapprochement et l'éloignement, le désir et le risque: Simon Froehling aborde un sujet grave, récurrent dans les années 1990 et qui n'apparaît presque plus dans les romans d'amour gay aujourd'hui. Il faut, m'a-t-il expliqué, que la génération actuelle en prenne conscience. Libertin et responsable, chapeau Simon! Un livre qui s'interroge aussi, entre les lignes, sur ce qui peut être raconté, ou pas. Et le prochain? "Ich denke, ich werde mich erst mal freischreiben müssen", a-t-il répondu au mensuel Cruiser. L'écriture décidera.

Ulysse

3 commentaires:

Adal a dit…

J'ai lu que 11'000 personnes avaient fréquenté les Journées littéraires cette année. Je suis impressionné. Est-ce que cela se passe sous une tente, comme les festivals de rock?

En réponse à Adel, Ulysse a dit…

Bonjour Adel! Je ne sais pas comment les responsables établissent leur compte. Avec ma carte permanente valable les trois jours, j'ai assisté à une vingtaine de lectures et d'ateliers. Est-ce que je compte pour une personne ou vingt? Il y a deux, trois voire quatre séances à peu près chaque heure dans des salles différentes du Landhaus, splendide bâtiment au bord de la rivière, et dans d'autres lieux, théâtre, musée, cinéma, place publique...
L'ambiance est familiale; dès qu'il fait beau, le restaurant voisin sort des tables et des bancs où se réunissent auteurs, présentateurs, journalistes et lecteurs. La ferveur des Alémaniques envers leurs écrivains préférés, Suisses ou étrangers, a beaucoup de charme. C'est réconfortant de sentir tant d'amour et de respect envers le livre.

Anonyme a dit…

Kevin a dit.

Bonjour Ulysse,
merci pour tes deux derniers chroniques sur et autour des Journées littéraires de Soleure. J’ai éprouvé un plaisir particulier de te lire. L’amour, la fraternité et l’envi de découvrir l’autre sont quelques attributs de l’homme qui font que la vie soit digne d’être vécu.